Aujourd’hui, il est de notoriété publique que le vélo est devenu une institution aux Pays-Bas. Mais pour comprendre comment les bataves ont fini par truster la première place sur le podium mondial des utilisateurs de vélo depuis de longues années, il faut remonter de presque 150 ans.
Fin du XIXe siècle, le vélo dit moderne commence à se développer en Europe. Alors que ses voisins choisissent de s’orienter vers la performance, les courses et la vitesse, la Hollande se dirige vers une autre voie : le vélo découverte. En 1883 est fondée l’ANWB (Algemene Nederlandsche Wielrijdersbond, ou Royal Touring Club des Pays-Bas) qui va promouvoir le tourisme à vélo et développer les infrastructures facilitant sa pratique pendant plus de 80 ans, jusqu’à l’inexorable essor de l’industrie automobile.
L’engouement est immédiat au sein de la population, jusqu’à la reine Wilhemine (qui régna de 1898 à 1948) surnommée la petite reine, grande habituée des déplacements à vélo. (PHOTO)
Mais ce n’est pas tout. Durant la première guerre mondiale, les Pays-Bas restent neutres et ne s’engagent pas mais subissent malgré tout le blocus allemand. Privée d’essence, la population délaisse leur nouvelle voiture pour remonter sur leurs deux roues. L’ANWB, qui n’en demandait pas tant, se voit donc dans l’obligation de faire construire davantage de pistes cyclables. C’est ainsi que naissent d’emblématiques marques (Batavus, Sparta, Gazelle) qui 100 ans plus tard, sont devenues des références dans le monde du vélo.
Au milieu des années 50, les Pays-Bas comptent deux fois plus de pistes cyclables que la France. Mais leur élan va se voir freiner par l’essor de l’automobile. Jusqu’en 1970, l’utilisation du vélo est en vertigineuse baisse. Mais c’est sans compter sur le peuple batave, qui au début des années 70 manifeste régulièrement pour la défense des conditions de route dans leur pays : de plus en plus de cyclistes meurent renversés chaque année. De plus, le premier choc pétrolier de 1973 vient renforcer cette dynamique pro vélo et c’est ainsi que les premières pistes à double sens font leur apparition dans des villes comme Amsterdam, Rotterdam ou Utrecht à la fin des années 70.
Le mouvement prend de plus en plus d’ampleur, jusqu’en 1990 où un premier plan national vélo est mis en place : aménagement des espaces cyclables, sécurité des usagers, logistique prévu à cet effet (les fameux parkings géants pour vélos sont construits). Cela fonctionne si bien que 20 ans plus tard, l’Etat va investir plus de 25 millions d’euros dans la construction-rénovation de pistes cyclables partout dans le pays.
Si bien que de nos jours, les Pays Bas sont les premiers utilisateurs de vélo au monde loin devant la concurrence : en 2019, 36% des hollandais utilisaient quotidiennement leur deux-roues. Sur la route, les cyclistes sont prioritaires face aux piétons, qui le sont également face aux voitures. Chaque année, un hollandais parcourt environ 10x plus de distance qu’un français, il y a d’ailleurs davantage de vélos que d’habitants aux Pays-Bas !